Panneau « Cléopâtre »
mercredi 01 octobre 2025
La rentrée se fait aussi au musée et, cette année, nous accueillons l’icône de renommée internationale : Cléopâtre.
Panneau « Cléopâtre », vers 1884, faïence fine
Majolique, émaux cernés et peinture à l'or
Modèle d'Alexandre Sandier
Faïencerie de Sarreguemines
Premier étage du musée de la Faïence.
Autour des années 1884-1889, la manufacture de Sarreguemines commande un dessin à Alexandre Sandier (1843-1926) et celui-ci est présenté sur un panneau céramique lors de l’Exposition Universelle de 1889. C’est la reine Cléopâtre, à demi-allongée sur un divan à tête de lion, qui nous présente son profil découpé comme sur une pièce de monnaie. Son regard semble perdu dans le vague, la main sous le menton et, à ses pieds, une jeune femme joue de la musique, sur une terrasse donnant vue sur un désert évoquant le Nil et les pyramides. Si Cléopâtre est habillée d’une simple robe, elle est couverte de bijoux, en or ou en bronze, à pierreries bleues et vertes, sur lesquels nous pouvons discerner scarabées et serpents. Sur son front, d’ailleurs, se dresse le cobra des pharaons et des reines d’Égypte – l’uraeus, symbole royal et divin d’ancienne Égypte. Celui-ci est discret, mêlé à un ruban fin noué sur sa chevelure aux reflets mordorés.
Dans l’angle supérieur gauche, une inscription hiéroglyphique se lit de haut en bas : KLEOPATRA. C’est la transcription la plus connue de ce nom utilisé par sept reines lagides (dynastique d’origine gréco-macédonienne, mise en place après la conquête de l’Égypte par Alexandre le Grand vers 332 avant notre ère). Reine d’Égypte de 52 à 30 avant J.-C., de ses dix-sept à quarante ans, elle a été longtemps enfermée dans des clichés véhiculés par la propagande de l’Empire romain, dans le conflit qui a opposé Cléopâtre (et Marc Antoine) à Octave, futur empereur sous le nom d’Auguste. Cette propagande visait à discréditer la légitimité de Cléopâtre à régner et l’a transformée en figure orientale aux mœurs légères et vulgaires afin de la rendre détestable dans l’opinion publique romaine.
Cependant, les recherches actuelles montrent une reine stratège, tant dans le domaine administratif qu’économique, ou encore guerrier. Elle a su étendre son territoire et gagner, dans un premier temps, la protection du grand Empire romain. Elle a ensuite assuré la souveraineté de sa descendance grâce à de grandes campagnes de construction architecturales et par des cérémonies religieuses ou de célébrations de ses victoires, en mettant en avant, à ses côtés, ses quatre enfants.
Ici, Alexandre Sandier et la manufacture de Sarreguemines nous présentent une figure apaisée de Cléopâtre, pour un panneau destiné à une décoration intérieure. À l’origine, les quatre-vingts carreaux de céramique étaient posés sur un support de béton, à renforts métalliques, afin d’être apposé sur un mur. Malheureusement, le poids des cent cinquante années a exercé une pression qui avait fissuré quelques carreaux et des retouches hasardeuses avait terni son émail.
Grâce à une grande campagne de mécénat – notamment en partenariat avec la Fondation du Patrimoine, Cléopâtre a pu bénéficier d’une restauration exceptionnelle : nettoyage de l’ensemble, reprise des éléments détériorés, comblement des lacunes et montage sur un nouveau support garantissant sa pérennité. Cette campagne offre au panneau un nouvel éclat et, au public, la vision d’une œuvre inédite dans nos salles.